Wednesday, 22 April 2020 17:06

L’histoire sacrée d’al-Hamel

 

 

Les mythes, les légendes et les contes font partie du patrimoine culturel immatériel, ils sont fondateurs dans chaque parcelle de l’Algérie.

Il y a beaucoup d’histoires que les anciens racontent. Et nous, sous couvert de rationalité, on répond : « ça n’existe pas », ou sous couvert de religion, on dit : « c’est bid’a (بدعة).

Faux ! Ces histoires souvent symboliques, contribuent à construire notre identité, notre sentiment d’appartenance et notre fierté.

C’est une fierté que Médéa soit une ville offerte par les anges, que Sidi M’hamed ait deux tombes à Alger et en Kabylie, que Lalla Mansoura al-Amazighiya de Ouargla ait été aspirée par les cieux, qu’à Timimoun il y eut 7 sœurs d’une beauté rare qui soient fondatrices de 7 tribus et 7 ksars.

Voici une histoire qui nous vient de Boussaâda, exactement d’al-Hamel, qui donne sens aux notions de « sentiment d’appartenance » et du « vivre ensemble ». C’est la ville de Lalla Zineb et la ville d’accueil de la Rahmaniya, aux temps difficiles après l’insurection de 1871.

Ça se passe vers le 15e siècle. Il n’y avait rien à el-Hamel, juste le désert, de la terre et quelques buissons éparpillés.

Deux vieux (certains disent trois) venus de loin, se sont arrêtés pour se reposer, puis passer la nuit, pour continuer demain et aller plus loin, à la recherche de leur destin. Ils avaient, pour supporter la route, que leurs bâtons de pèlerins.

Le plus vieux a déposé son bâton à côté de lui pour s’aider à se relever au réveil. Mais dans la nuit, l’herbe a poussé autour du bâton et l’a enveloppé, comme s’il était resté plusieurs jours dans une terre marécageuse.

Le vieux, ne pouvant pas arracher son bâton au sol en conclut : « cette terre a décidé de nous retenir chez elle. C’est là que nous allons élir domicile. »

Ils contruisirent un abri de fortune et restèrent. Peu à peu des gens vennaient leur demander conseils, ou habiter près d’eux parce que chassés de leurs tribus…

C’est ainsi que se contruit un village et se peuple: c’est un village sacré parce qu’il a été fondé par deux hommes sacrés, des awliya’ Allah al-salihine (ceux qui disent qu’ils étaient trois, disent aussi que le troisième aurait continué sa route pour trouver plus loin son destin) et tous ceux que la vie a éprouvés, les leurs les ont rejetés et cette terre d’al-Hamel les a accueilli. Al-Hamel, la terre des errants est une terre d’accueil pour les gens égarés.

Ce qui va ajouter à la sainteté de la ville est l’arrivée quelques siècles plus tard de Sidi Belkacem qui va fonder là sa zaouïa, alors que tout le destinait à être un grand maitre de la Rahmaniya à Ath-Smail en Kabylie où il a fait ses études ou à Alger pour seconder le maitre de la Tariqa.

Lorsque les gens de la Rahmaniya ont été inquiétés par les français, fermant la zaouia de Ath-Smail puis son annexe d’Akbou et perturbant les activités de celle d’Alger, emprisonnant, exilant et martirisant les adeptes, Chaykh Aheddad, le père spirituel de la Tariqa leur dit : « Allez à al-Hamel, il y a la-bas un maitre qui vous attend ».

Ainsi les choses ne se font jamais par hasard. Il y a toujours une philosophie, une raison d’être, une éthique, une sagesse que le non-initié ne perçoit pas. Comme le battement de l’aile d’un papillon peut provoquer un tsunami à quelques milliers de kilomètres plus loin dans l’espace, la décision d’un chaykh au XVe siècle, de faire société en un lieu, peut être la raison d’un entendement fait pour recevoir la plus grande Tariqa algérienne au XIXe siècle. Là où les grands saints (ahbab Allah) auront toujours leur place.

Al-Hamel est devenue une des plus grandes universités de théologie et de littérature en Algérie qui a fonctionné jusqu’à l’indépendance, parce qu’un jour deux pèlerins y ont passé la nuit.

Les tombes des deux pèlerins sont toujours visitées à quelques mètres de la zaouïa qui est venue leur donner raison, là où repose Lalla Zineb, son père et leurs successeurs.

 

       

Sidi Belkacem

Lalla Zineb

Zaouia el-Hamel

Tombes des 2 errants

 

 Ouiza Gallèze

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